La crise d'adolescence

3 repères pour traverser l’adolescence en famille

Article écrit par Baptiste Fiche en lien avec le dernier ouvrage de Benoit Broyart "la crise d'ado de mon grand frère" auquel il à contribué. Baptiste Fiche est psychologue clinicien au sein de l' Association Les Mots des Familles et de la Fédération "Pâtes au Beurre". 

Il ne vient plus vous réveiller à 7h le dimanche matin mais au contraire vous ne le voyez plus avant midi (au mieux) ? Et bien vous y voilà, vous n’avez plus un enfant mais un adolescent. C’est-à-dire un être qui cherche sa place, entre l’enfant qu’il n’est plus et l’adulte qu’il n’est pas encore. Dans certaines familles ce processus se déroule sans heurts, ça pique par moments mais ça ne dure pas. Dans d’autres familles, c’est un cataclysme dont on pense ne jamais voir le bout. Dans la plupart des familles, c’est un peu des deux.

Parce que chaque famille est singulière, il est périlleux de délivrer de manière générale des conseils pertinents pour tous. Par contre, en donnant des repères à s’approprier, c’est faire le pari de la recherche collective d’une solution par la famille elle-même. C’est tout le sens de la collection « Et si on parlait de... » et du principe de la lecture accompagnée : que toute la famille entre en dialogue pour surmonter la crise, quel qu’en soit l’objet, que l’on soit parent, adolescent ou enfant.

Voici 3 repères pour traverser l’adolescence en famille, comme autant de sujets à discuter ensemble :

  1. A chacun ses besoins

Dans une époque marquée par la psychologisation à outrance du moindre comportement, il n’est pas inutile de rappeler que c’est d’abord par le corps que commence l’adolescence. La puberté marque une transformation du corps de l’adolescent « à l’insu de son plein gré ». Là où l’enfant est en pleine possession des capacités de son corps, l’adolescent se retrouve à devoir gérer le sien au quotidien pour le rendre acceptable à ses yeux et, au fur et à mesure, désirable par l’autre. Car sur le plan psychique, une transformation majeure s’opère également : de son inscription totale dans le désir de ses parents en tant qu’enfant, l’adolescent va peu à peu construire son propre désir et le faire valoir. La crise, dans sa forme brutale, violente, surgit quand la tension physique et/ou psychique devient insupportable. Et ce n’est pas l’apanage des adolescents ! Nombre de parents témoignent de l’agressivité des enfants plus jeunes, se voyant déjà vivre un enfer lors de l’adolescence à venir. Et nombre de parents témoignent de leur propre agressivité face à des réactions qu’ils ne comprennent pas. Si les manifestations peuvent être identiques, elles ne répondent pas des mêmes besoins.  Ainsi, l’enfant a besoin de tester les limites de son corps, tout comme il a besoin de tester les limites parentales, pour les éprouver et s’assurer de leur inconditionnalité. L’adolescent a besoin de maitriser son corps pour se sentir désirable par ses pairs et a besoin de « maitriser » ses parents pour se sentir reconnu comme quelqu’un de responsable. Les parents ont des besoins en miroir : face à l’enfant ils veulent que les limites posées n’entament pas le lien et face à l’adolescent ils veulent pouvoir faire confiance. Dans les deux cas, les parents ont surtout besoin de ne pas trop avoir à s’inquiéter et d’avoir assez d’énergie pour survivre à tout cela.

  1. A chacun ses espaces

Le premier confinement a servi de piqûre de rappel : être tout le temps ensemble c’est sympa, mais ça a ses limites. Entre les sollicitations incessantes du petit et les soupirs répétés de l’adolescent qui ne peut pas rejoindre ses amis et ne peut pas passer sa vie sur les écrans, les parents ont eu fort à faire. Certains ont pu témoigner du soulagement du retour de l’école et au travail, tout en ayant apprécié le temps passé en famille.

C’est que partager l’espace physique n’est pas si simple, et partager l’espace psychique encore moins. L’enfant, tout entièrement pris dans le désir parental, occupe tout l’espace physique, le remplit même parfois de ses objets et a du mal à comprendre pourquoi il devrait les ranger dans un seul endroit, alors qu’il joue partout. « C’est chez moi », au premier degré : le logement de ses parents est le sien. La parole de ses parents est également la sienne et ses mensonges maladroits signifient bien que, sur le plan psychique, il n’est pas encore en capacité de ne pas « dire la vérité ». C’est par le jeu que l’enfant finira par poser une frontière entre mensonge et vérité, c’est par la fiction que l’on accède à la réalité. Pour l’adolescent, partager l’espace physique de la famille passe par la possibilité de s’y soustraire. La chambre de l’adolescent lui sert à se cacher et à cacher ce qui relève de son intimité. Cet espace qu’il affirme n’appartenir qu’à lui est aussi celui qui va lui permettre de construire son identité, à l’abri du regard de la famille. Tout en réaffirmant son appartenance via ses objets trainant partout : « c’est chez moi aussi ! ». Pour les parents, toute la difficulté est de maintenir un « c’est chez nous » avec des espaces pour chacun, pour que l’enfant s’individualise progressivement, pour que l’adolescent construise son identité, et pour eux-mêmes afin de pas être écrasés par la charge parentale. Ces espaces, y compris à l’extérieur du logement, sont nécessaires pour pouvoir souffler, reprendre de l’énergie et avoir envie d’y retourner. Les adolescents l’ont bien compris. Encore faut-il que les parents réussissent à maintenir ces espaces !

  1. A chacun ses expériences

Dans l’enfance, l’autorité peut se fonder sur un « parce que je suis ton père ou ta mère » sans plus d’explication. Parce que cela fait sens pour l’enfant mais aussi parce qu’il n’a pas de désir à y opposer, ce qui en passant laisse les parents dans une sacrée illusion de puissance. Pour l’adolescent, cela peut s’avérer insuffisant et faire l’objet de contestation. C’est aussi une façon pour l’adolescent de signifier le besoin d’avoir des parents qui tiennent la route et pas seulement sur un mode autoritaire dans une période aussi instable. Enfin, c’est peut-être tout simplement une forme d’imitation de l’adulte, prompt dans notre modernité à remettre en cause toute forme d’autorité (hiérarchique, politique, scientifique, etc.), y compris quand celui ou celle qui l’incarne a été choisi par lui.

Dans ces moments où l’autorité vacille, où les parents se sentent débordés, la tentation première est de répondre par plus d’autorité. C’est peut-être nécessaire, mais dans le même temps il peut être intéressant de s’interroger sur d’autres fondements de l’autorité, telle que l’expérience. L’avantage de l’expérience, c’est qu’elle n’est pas contestable, à condition qu’elle soit authentique et non moralisante. Il faut toujours se méfier des « moi, à mon âge... », car l’être humain a la fâcheuse tendance à reconstruire ses souvenirs à son propre bénéfice. Il ne faut donc pas hésiter à faire attester son expérience par ses propres parents ou proches !

S’appuyer sur son expérience de la vie pour fonder en partie son autorité permet de faire passer (et de se rappeler) un certain nombre de messages : le droit à l’erreur en est un essentiel, on l’oublie trop souvent et le parent inquiet encore plus. C’est aussi l’occasion de rappeler que peu importe la façon dont s’est déroulée son adolescence, la plupart du temps on s’en sort sans trop de casse (au pire il y a des psychologues...). Et pour le petit frère ou la petite sœur, quel soulagement de le savoir car de son point de vue, l’adolescence peut paraitre plus proche du risque d’abandon que de la garantie d’un amour parental inconditionnel !

C’est aussi ce que raconte « la crise d’ado de mon grand frère » ! Pour commander l'ouvrage, contactez-nous

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